La pilule pour homme, est-ce pour bientôt ?
Dans quelques années sans doute, ce seront nos compagnes pour nous rappelleront de bien prendre notre pilule contraceptive avant l’heure du coucher. Et oui, la pilule pour homme existe ! Enfin, pour être exact, elle existe presque. Ou pas tout à fait. Essayons de démêler tout ça ensemble.
La contraception, un truc de bonhomme !
Quand on touche au problème de la contraception, les femmes ont devant elles un choix plutôt vaste : pilule, patch, stérilet, préservatifs, anneau vaginal, implant, ligature des trompes… De leur côté, les hommes n’ont que peu de solutions au-delà du préservatif, et les progrès scientifiques sont lents. Mais en ont-ils seulement envie – les hommes ?
Manifestement, oui ! Un sondage CSA de 2012 nous apprend que 61% de ces messieurs sont favorables à la pilule pour homme ; et les femmes sont exactement aussi nombreuses à désirer transférer cette responsabilité à leur compagnon. L’égalité des sexes, c’est aussi ça : le partage de la pilule contraceptive.
Pour nous, les hommes, les possibilités de contraception sont vite limitées :
- La vasectomie : 1% des hommes seulement y aurait recours, contre 15 à 20% aux Pays-Bas et au Royaume-Uni ;
- La contraception « thermique » : en gros, on enfile un slip qui remonte les testicules pour les garder au chaud, la chaleur arrêtant la production des spermatozoïdes (une pratique que je n’encouragerais pas, pour ma part, pour le bien-être de nos attributs familiaux) ;
- La contraception hormonale, ou pilule pour homme : c’est elle qui nous intéresse ici. Elle n’a été que peu testée pour l’instant, et rares sont les médecins qui la prescrivent en France.
Une pilule pour les gouverner tous
Le principe de la pilule pour homme a été validé par l’Organisation mondiale de la santé, mais son expérimentation tarde à se développer. Des chercheurs du monde entier travaillent depuis des années à mettre au point une telle pilule contraceptive. En France, les équipes y bûchent depuis plus de deux décennies. Pour quel résultat ?
Les choses avancent, et ce petit geste quotidien ne sera bientôt plus exclusivement féminin. La recherche dans ce domaine est particulièrement active, et des solutions innovantes sont explorées régulièrement. La plus proche de nous est la pilule hormonale. Voici comment elle fonctionne.
La pilule pour homme, comment ça fonctionne ?
Commençons par voir comment fonctionne une pilule pour homme au niveau médical. Un testicule produit à la fois des spermatozoïdes et de la testostérone. La glande hypophyse génère des hormones LH et FSH qui permettent de réguler la production de spermatozoïdes en jouant sur la taux de testostérone.
L’idée, c’est donc de signifier à l’hypophyse qu’elle doit baisser la production d’hormones, dont l’effet sera de réduire de fait celle des spermatozoïdes. Et comment communiquer cet ordre à l’hypophyse ? En apportant de la testostérone ou de la progestérone en excès, à l’aide de la pilule en question.
Pourquoi de la progestérone ? Parce qu’à haute dose, la testostérone peut avoir des effets négatifs sur la santé. Pour preuve : voyez les adeptes du bodybuilding et leur consommation excessive de cette hormone. La pilule pour homme se propose d’associer, à une petite quantité de testostérone, une plus grande part de progestérone, moins agressive.
Les bons et les mauvais côtés de la pilule masculine
Théoriquement, une pilule hormonale est très aisée d’utilisation et a peu de conséquences sur l’organisme :
- Elle n’occasionne pas de modification organique (contrairement à des excès de testostérone) ;
- Elle contient la même dose tous les jours, puisque les hommes n’ont pas de cycles hormonaux – elle est donc bien plus facile à prendre, pas besoin de calendrier ;
- Elle peut être stoppée sans risques.
Toutefois, le chemin qui mène à une telle pilule est semée d’embûches. Si les chercheurs n’ont toujours pas abouti, c’est qu’ils sont confrontés à des difficultés :
- L’homme a un système de reproduction très efficace et il suffit de quelques spermatozoïdes sur plusieurs milliards pour engendrer une grossesse ; réduire ce risque à zéro n’est donc pas une mince affaire.
- L’efficacité des traitements hormonaux n’est pas une science exacte, elle dépend beaucoup de l’organisme : les Asiatiques, par exemple, réagissent mieux à ces traitements que les Européens, sans que les scientifiques ne puissent expliquer pourquoi.
- Si une telle pilule peut être stoppée du jour au lendemain, cela ne signifie pas que ses effets disparaissent en claquant des doigts. En effet, il faut 74 jours pour fabriquer un spermatozoïde : il faut donc autant de temps pour que le traitement soit efficace, puis une période tout aussi longue, une fois la pilule arrêtée, pour que les hormones n’empêchent plus la production de spermatozoïdes.
Les solutions alternatives
Outre la pilule hormonale, d’autres solutions sont testées par les chercheurs. En voici deux parmi d’autres :
- Une pilule basée sur une plante indonésienne, la Justica gendarussa, utilisée en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Un composant chimique inspiré de cette plante serait efficace à 99% pour empêcher les grossesses.
- La molécule JQ1, testée sur des souris de laboratoire, qui inhiberait la production de spermatozoïdes. Ses effets seraient, en outre, réversibles. Si cette découverte était transposée à l’homme – ce qui pourrait être prochainement le cas –, le traitement qui en découlerait serait un contraceptif idéal.
Je n’avais donc pas menti : la pilule pour homme existe sans exister vraiment, elle est à la fois parmi nous et pas tout à fait. Ce qui est certain c’est que, poussée par le désir des mâles de partager cette responsabilité avec ces dames, elle devrait très rapidement se démocratiser.